17m2
- Jean-Michel Imhof
- 22 déc. 2020
- 2 min de lecture

Quand il n’y a plus de mondes.
Plus de variétés.
Seulement 17m carrés.
Quand il n’y a plus de rencontres,
D’opportunités.
Seulement un écran à regarder.
Je marche dans les rues.
Sous autorisation.
Mais n’ai pas le droit de sortir de mon quartier.
Je marche dans les rues.
Sombres, froides, humides.
Vides.
Noël scintille. Mais sans musique.
Dans le silence.
Noël scintille.
Mais pas partout.
Il est des espaces disparus.
Trous noirs dans les décorations des rues.
Quand la seule sortie du jour,
Pour faire les courses,
Remplit de joie,
Sans que je ne comprenne pourquoi.
Acheter, consommer un peu,
Au supermarché.
Car tous les autres sont fermés.
L’exaltation de s’acheter,
Des pâtes et du papier wc,
Sans exagérer.
La joie de demander « combien ça fait ? »
Alors que, évidemment, je le sais.
Juste pour parler.
Et traîner un peu, le pas lent, avant de rentrer.
Se presser pour quoi ?
Pour qui n’attend pas ?
Et rentrer, car il le faut.
Et car il fait froid.
Mais au moins rentrer dans un « chez soi ».
Allumer la climatisation.
Pour chasser cette froide sensation.
Pour réchauffer un peu les murs.
17m carrés, et en dur.
Allumer une bougie,
Réchauffer l’espoir aussi.
Se réjouir car le frigo est plein.
Il y aura encore de quoi manger demain.
Se réjouir de la lumière qui reviendra le matin.
Et attendre.
Attendre.
Que tout change enfin.
Et se convaincre.
Forcer cette petite voix en soi,
Qui doit dire que tout ira bien.
D’autres circulent librement.
D’autres ne respirent plus.
D’autres n’ont qu’un carton.
Le seul lien qui nous unit tous,
En général,
Depuis toujours,
C’est l’humanité.
Peut-être l’a-t-on un peu laissé aller.
Aujourd’hui il en est un autre.
Qui impose de tout changer.
Qui attriste le monde,
Nous force à reconsidérer
Ce qui réellement
Nous fait avancer.
Coupés les liens,
Et du coup tellement dans le besoin.
Quand il n’y a plus de mondes
Que celui de son intérieur.
Quand 17m carrés
Sont d’une vie l’espace infini
Pour jouir et rêver.
Monde incertain.
Tu repousses les limites de l’humain
A ses confins.
Monde auquel,
Quoi que je fasse
De toute façon
Et pour toujours,
J’appartiens.
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